Un frisson lui parcourt l'échine.
Elle ferme les yeux.
La radio est crachotante.
Et pourtant la voix lui parvient, pure, ample.
Elle ferme les yeux plus forts.
Elle oublie presque les incessants bip.
Elle s'évade juste un peu. Quelques secondes.
Elle s'entend presque chanter en écho, dans sa tête.
Avec sa petite voix chevrotante.
Mais derrière ses paupières sont imprimés les visages.
Ces visages si familiers.
Et sa voix s'échappe, devient un murmure.
La radio crachote une derrière fois.
Elle ouvre les yeux, sourit à la nouvelle personne face à sa caisse.
Bip, bip, bip.
Elle fait le même geste à la perfection.
Les articles s'enchaînent avec rapidité sur son tapis roulant.
Elle sourit en pensant à eux.
Un sourire fragile. Une petite étincelle qui réchauffe son cœur.
Qui donne sens à tout, même à ces bruits mécaniques.
La monnaie passe de main en main.
Le vol serait si facile. Mais impensable.
Et elle pense à cet argent sagement mis de côté pour des folies.
Elle pense à Sim, alors. Elle pense à lui parce qu'elle connait peu de personnes comme lui.
Elle a tout le temps de penser.
Les mêmes gestes, les mêmes chansons à la radio.
à nouveau ce chant lyrique envoûtant.
Un espoir chargé de tristesse.
à chaque fois.
La radio crachote les dernières notes.
Un sourire fragile.
Les petites folies se limitent à peu de choses.
Un bonbon donné gentiment par la caissière de droite.
Une chanson murmurée derrière l'immeuble, ou sur le chemin du retour.
Un sourire à un joli inconnu.
Une vaisselle à faire remise à plus tard.
Un bisou sur la joue de Lluvia.
Les gâteaux préférés de Pavel.